TEXTE PAR JACQUES MALNUIT POUR PARAMAG N°118 MARS 1997.
Le Base jump est une forme de parachutisme. Médiatisé par certaines pub et magazines spécialisés, pratiqué en dehors des terrains réglementés et le plus souvent en pleine nature, cette activité hors du commun attire de plus en plus de pratiquants. Le manque d’information peut rapidement mettre un débutant en danger grave, voire mortel. Cet article n’est pas une initiation au Base jump.
© Jean-Noël Itzstein
Ce qu’il ne faut surtout pas faire
Il ne faut pas croire que le Base jump est facile, surtout quand on débute. La moindre erreur risque de devenir rapidement fatale. Et même après des centaines de sauts, on est toujours exposé à un incident.
Voici une liste non exhaustive de ce qu’il ne faut surtout pas faire :
– De préférence, ne pas utiliser du matériel de parachutisme, surtout usagé ou en mauvais état. Attention aussi à qui on achète le matériel, il faut se renseigner sur la personne ou la société. Les voiles en tissu porosité zéro, les 9 caissons et les mini-élévateurs sont à bannir. Il n’est pas indispensable d’utiliser un sac avec voile de secours (type saut d’avion), surtout si celle-ci n’est pas adaptée au Base jump ! Toutefois cela peut aider psychologiquement ou pour des grandes hauteurs du genre El Capitan aux USA. Dans la plupart des cas, l’altitude d’ouverture est très basse, on manque donc de temps et d’espace pour mettre en oeuvre un parachute de secours. L’avantage de ne pas en emporter est qu’un matériel simple de conception sera simple d’utilisation. Quelqu’un qui ne croit pas en sa voile principale ne doit pas pratiquer le Base jump !
– Il vaut mieux éviter de contacter la presse ou la télévision avant chaque saut, ou même simplement une bande de copains avides de sensations. Le Base jump est un acte personnel, ce n’est pas un exploit que l’on exclame dans tous les bars et les centres, il doit rester discret.
– Attention de ne pas se considérer comme un « instructeur » après quelques sauts réussis et se croire capable de sauter de n’importe quel endroit, voir même d’emmener un débutant ! Il faut toujours s’informer des nouvelles techniques, des problèmes rencontrés chez les autres et analyser les situations.
– Ne pas faire la fête la veille d’un saut, il faut toujours pratiquer à 100% de ses moyens et de ses connaissances. Ne pas surestimer ses capacités techniques sous prétexte que quelqu’un parvient à telle ou telle performance.
Voici donc les premiers pièges à éviter. Voyons maintenant quelques consignes de base.
© Stéphane Ruby
Ce qu’il faut surtout faire
Le Base jump est dix fois plus dangereux que le saut d’avion. C’est pourquoi il faut vraiment s’y consacrer et ne pas le considérer à la légère. Il faut bien comprendre son fonctionnement et respecter les différentes étapes de sa progression. Il est donc préférable de demander conseil à un « instructeur » (il n’existe aucune « qualif » en la matière…) qui possède au minimum 50 sauts de Base jump à son actif. Il sera en mesure de choisir des spots d’initiation adaptés pour les premiers sauts ainsi qu’un équipement moderne de Base jump. En plus du parachute, il est conseillé de s’équiper d’un casque léger, de bonnes chaussures, de coudières et de genouillères, surtout pour les premiers sauts et les endroits délicats. En outre, voici 5 règles à respecter impérativement :
1) Connaître les dangers attenant aux conditions météo, au soleil et au vent (en chute et au sol, pour l’atterrissage).
2) Connaître le point de sortie.
3) Connaître le délai de chute (voir table).
4) Connaître le point d’atterrissage en fonction de la finesse de la voile.
5) S’assurer que l’on est capable de partir en position stable à vitesse zéro.
Le matériel
Le parachute sera spécialement conçu ou préparé pour le Base jump et il sera correctement plié pour ce type de sauts.
Le sac-harnais. Le sac le plus simple et le plus pratique d’utilisation est de type monovoile à fermeture par velcro, sans secours. L’avantage de ce sac type velcro est que l’on peut facilement plier la voile en 2 plis seulement, au moment de la mise en sac ; ce qui favorise également un bon déploiement et une bonne mise en pression du caisson central. La fermeture par velcro évite toute interférence d’ouverture, surtout quand on se faufile contre des rochers ou autres objets susceptibles de provoquer une ouverture intempestive. Il est très pratique également par son épaisseur pour se dissimuler sous un vêtement pour les sauts de building ou autres « fixed objets » illégaux. Très léger pour les ascensions de hautes falaises où l’accessibilité demande plusieurs heures de marche d’approche.
Il existe environ 4 fabricants sérieux dans le monde pour ce type de sac-harnais. Les prix peuvent varier de 2 500 à 3 500 F. Ils sont toujours livrés avec une drisse de liaison voile-extracteur, mais sans élévateurs ni extracteurs.
Le deuxième type de sac-harnais utilisé en Base jump est le Sorcerer, conçu par l’américain Mark Hewitt. Il comporte un parachute de secours de type aile, tout dans le dos et capable de s’ouvrir en seulement 10 mètres après une libération. Une poignée positionnée au niveau de l’épaule actionne le système d’ouverture de type pull out. Celui-ci se déconnecte en cas d’action secours direct. Dans le cas d’une libération, c’est la voile principale qui devient solidaire du POD de secours (par l’intermédiaire d’une drisse) et qui fait donc office d’extracteur. C’est un système similaire au LOR ou Stevens qui équipe beaucoup de sac-harnais école, mais à la différence que la drisse est également reliée au POD, afin d’obtenir une extraction plus rapide de la voile de secours.
Attention ce type de sac est réservé à des base jumpers expérimentés. Il faut également se méfier de certaines copies qui circulent sur le marché. Il existe un seul fabriquant dans le monde de ce type de sac-harnais et son prix et d’environ 5 000 F ht.
© Philippe Fragnole
La voile principale. On choisit de préférence une grande surface pour palier aux atterrissages difficiles et aux emmêlages éventuels. Il existe actuellement 3 fabricants de voiles spécifiques Base jump dans le monde. Toutes sont livrées pratiquement prêtes à l’utilisation, c’est-à-dire avec système de déploiement de type tail pocket, 2 glisseurs (un en F-111 et un autre en résille), les manilles et 2 points de freinage. Les autres systèmes sont en option (gaine, POD, direct bag).
Voici les principales caractéristiques de ces voiles :
1) Renforcement pour les ouvertures fortes, stabilité, spécialement en précision d’atterrissage pour les vols lents.
2) Facilité de pliage due à des « packing tabs » correspondant directement aux groupes de suspentes et qui facilitent donc l’alignement.
3) Sur les derniers modèles de voile on peut également trouver le « tail gate », système anti line-over et le « multi », système de point d’encrage spécial réservé aux pratiquants expérimentés à cause de sa complexité de pliage.
Les extracteurs. Aujourd’hui ils sont pratiquement tous en porosité zéro et avec une grosse résille pour favoriser le gonflage. Attention, il faut s’assurer qu’ils ont été construits dans les règles de l’art, avec les renforts nécessaires car l’extracteur est l’âme de l’ouverture ! Leur taille diffère en fonction de la voile utilisée (avec ou sans glisseur) et du type de sauts. Les élévateurs seront toujours larges, construits dans de la sangle type 8, avec un système de poignées spéciales débrayables. Le prix complet est approximativement de 500 F ttc.
En conclusion
Le Base jump est un sport fabuleux à condition aussi de respecter la nature, son environnement et les locaux. En Europe, il reste encore assez légal, donc mieux vaut appliquer tout ces critères. N’inventez pas ! Demandez conseil à une personne expérimentée, aussi bien pour la pratique que pour le matériel. Mais en plus d’être un sport, le Base jump est aussi un état d’esprit et le plus important, c’est de pouvoir en refaire ! Si vous avez des questions vous pouvez me contacter au xx.xx.xx.xx. Bons sauts !
Petit Lexique
Base jump : Saut d’un endroit fixe, « base » signifiant en fait B.A.S.E., regroupement des initiales de building (bâtiment), antenna (antenne), span (pont) et earth (falaise).
Point de sortie : L’endroit exact duquel on s’élance de la falaise. Pas toujours évident à trouver…
Finesse : Rapport entre vitesse verticale et vitesse horizontale qui se traduit par le rapport entre hauteur de descente et distance horizontale parcourue.
Fixed objets : objets fixes.
Tail pocket : Sorte de petite pochette fixée sur le bord de fuite et sur laquelle on love les suspentes. Direct bag : Méthode qui consiste à se faire tenir le POD par quelqu’un (pour l’école ou les sauts à basse altitude). Il faut un POD spécial.
Packing tabs : Petits morceaux de tissu fixés sur l’extrados pour étaler la voile au pliage.
Line-over : « Suspente coiffante », sorte d’emmêlage d’une suspente au-dessus de l’extrados.